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NousFemmes.org

15 mars 2011

par Christiane Pelchat, déléguée générale du Québec à Mexico

Christiane Pelchat, présidente du Conseil du statut de la femme. Photo : Le Devoir, 2009.

Quand nous pensons au vivre ensemble, à la façon de vivre en harmonie dans sa communauté, dans son pays, sur sa planète, nous réalisons l’importance du bien commun, de l’intérêt public. Nous sommes conscientes de devoir abandonner certains de nos désirs individuels, que nous confondons souvent avec des droits, afin que triomphe le bien commun.

Par exemple, en matière d’environnement, nous posons de plus en plus de
gestes moins nuisibles pour la planète. À l’épicerie, nous troquons le plastique pour le tissu ; à la maison, nous compostons, recyclons, réutilisons et récupérons.

Ces comportements témoignent de notre éveil aux autres et aux générations
futures. Nos droits individuels sont désormais balisés par le droit d’autrui à un environnement sain.

Nous adhérons à des principes qui guident le bien commun et qui, en même
temps, limitent nos droits individuels. Par exemple, pour protéger la langue française, nous avons fait le choix de restreindre la liberté d’expression, droit individuel. Nous payons des impôts qui ont des retombées bénéfiques pour nous, mais aussi pour les personnes moins
nanties. Le souci de justice sociale est même inscrit dans nos principes fiscaux.

Notre système de santé, bien qu’imparfait, est un témoin éloquent de la solidarité sociale dont nous faisons preuve. Si la distribution de la richesse ne faisait pas partie du rôle de l’État dans le domaine de la santé, la majorité des femmes aurait du mal à obtenir des soins de qualité.

Pourquoi n’en serait-il pas ainsi en matière d’égalité des sexes ?

Pendant qu’ici, nous célébrons la Journée internationale des femmes, et qu’ailleurs dans le monde, des centaines de femmes arabes marchent dans la rue pour la citoyenneté et l’égalité, je me suis permis de rêver du jour où...

  • Les emplois traditionnellement occupés par les femmes - secrétaires, infirmières, éducatrices, enseignantes, domestiques... - seront aussi bien payés que les emplois traditionnellement masculins ;

  • Un plan national pour l’intégration des femmes dans les métiers payants (traditionnellement masculins) sera adopté, et que l’on trouvera 50% de femmes dans l’industrie de la construction, par exemple ;

  • Les heures que les femmes travaillent à la maison seront comptabilisées dans le produit intérieur brut, indicateur de notre richesse ;

  • Les femmes seront reconnues comme la moitié de la race humaine, et non comme une des minorités à considérer ;

  • Nous serons toutes et tous solidaires des femmes qui vivent dans des modèles patriarcaux qui étouffent leur vie, leurs aspirations et leurs projets ;

  • Nous cesserons de faire du relativisme culturel, arguant le droit individuel de l’autre, sa culture et ses traditions en même temps que nous nions le droit des femmes à l’égalité ;

  • Nous n’invoquerons plus notre liberté personnelle pour justifier des pratiques et des comportements que d’autres femmes - et des milliers d’enfants - sont tenues de subir ou d’adopter par obligation, victimes de la traite ou mourant sous les coups pour avoir enfreint un code soi-disant d’honneur ;

  • Nous enseignerons l’égalité entre les sexes dès l’entrée de nos enfants au centre de la petite enfance et pour le reste de leur scolarité ;

  • Nous comprendrons que chaque fois que, comme femme, je renonce à mon droit à l’égalité, je renonce aussi pour d’autres femmes à ce droit.

    Enfin, je souhaite aussi que nous puissions compter encore longtemps sur des organismes comme le Conseil du statut de la femme du Québec pour rester critiques à l’égard des actions gouvernementales en ce qui a trait aux droits des femmes.

    En somme, je rêve d’un « nous femmes » fort et solidaire. Un rêve possible ? Oui, si nous reconnaissons qu’au-delà de nos personnalités propres, il existe un groupe - celui des femmes - traditionnellement discriminé partout dans le monde, car toutes les sociétés, qu’elles soient occidentales,
    orientales ou subsahariennes, sont patriarcales.

    Je souhaite que le mouvement féministe québécois résiste à la pression
    néolibérale de plus en plus présente au Canada anglais et en France, notamment, qui place les libertés et les droits individuels au premier plan. Le droit individuel de décider pour soi ne peut l’emporter sur le bien-être collectif.

    Rappelons-nous que chaque fois que l’on demande la reconnaissance de
    droits individuels, on risque de bafouer le droit des femmes à l’égalité.

    Je vous invite à rêver avec moi de ce monde solidaire et j’en profite pour vous souhaiter une bonne Journée internationale des femmes !

    "Le mot de la présidente", Gazette des femmes, Mars-Avril 2011.

    ***

    La Gazette des femmes gratuite
    Mouvement des femmes - Défis en perspective, Mars-avril 2011, vol. 32, no 5

    Les coupes de subventions et l’antiféminisme conjugués ont porté atteinte au mouvement des femmes au Canada. Au point de mettre sa survie en péril. Pourtant, militantes et féministes d’État persévèrent, se questionnent, haussent le ton, imaginent des moyens d’action différents, rêvent d’une relève engagée. Et si parfois elles doutent, leurs convictions féministes n’en sont pas pour autant réfrénées. Analyse des enjeux et défis du mouvement en 2011.

    À ne pas manquer également dans ce numéro :

  • Le viol correctif en Afrique du Sud, une autre pratique misogyne à combattre
  • L’équité salariale au Québec, pour bientôt ?
  • Entretien avec Ève Lamont, réalisatrice du documentaire L’imposture

    Excellente Journée internationale des femmes 2011 !

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    Bonne lecture !

    Le Conseil du statut de la femme

    Christiane Pelchat, déléguée générale du Québec à Mexico


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