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dimanche 6 mars 2005

Le mouvement des femmes en Algérie de 1962 à 1991






Écrits d'Élaine Audet



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De l’indépendance de l’Algérie en 1962 aux années quatre-vingt le mouvement des femmes algériennes ne pouvait émerger de la gangue imposée par le parti unique, le FLN. Malgré des conditions politiques très dures (absence de libertés collectives et individuelles), il y eut des moments où les Algériennes ont exprimé publiquement leurs aspirations à une situation non discriminatoire. La période de la maturation du mouvement. Au cours de cette période le mouvement des femmes algériennes va se heurter aux limites du cadre imposé par l’Etat-FLN à savoir l’Union des femmes algériennes -UNFA- créée le 19 janvier 1963, et élaborer ce qui va constituer le cœur des revendications à venir : l’aspiration à un statut de citoyenne à part entière.

La grande manifestation du 8 mars 1965

Durant cette journée, les femmes manifestent pratiquement toute la journée, se retrouvent dans une salle où elles expriment de fortes revendications pour leurs droits, soutenues de façon démagogique par le Président Ben Bella qui n’a toujours rien fait pour changer la situation des Algériennes. Il faut lire les ouvrages de Fadéla M’Rabet Les Algériennes écrits en 1965 et 1966 pour se rendre compte que l’indépendance n’a pas produit d’effet sur la condition des femmes. En Tunisie, au contraire, dès l’indépendance, en 1956, le Président Bourguiba va promulguer le code de statut personnel qui est en avance sur les pratiques sociales et coutumières.

Le débat autour du code de la famille en 1966

Des rumeurs annoncent l’adoption d’un projet de code de la famille dont la lecture permet de n’avoir aucun doute sur les intentions des dirigeants algériens : il n’y aura pas de modification de la hiérarchie familiale qui maintient les femmes dans la soumission aux hommes de la famille. Dans les milieux universitaires et au sein de l’UNFA on s’agite ce qui contraint le Président Boumédiene à déclarer le 8 mars 1966 : "Certaines rumeurs circulent depuis quelque temps à propos du code de la famille... Le code appelé à paraître est celui de la préservation du droit de la femme et de la famille algérienne". Finalement il n’est pas donné suite à ce projet.

Nouveau débat autour du code de la famille en 1973

Durant les mois de février et mars 1973, nouveau débats autour d’un avant-projet de code de la famille qui est jugé insatisfaisant par les femmes étudiantes, juristes et de l’UNFA qui le dénoncent et rejettent des dispositions comme la dot, l’interdiction du mariage avec un étranger, la polygamie, les conditions du divorce pour les femmes etc... Face à cette opposition, le projet est enterré.

La période de construction du mouvement indépendant 1979-1985

L’interdiction de sortie du territoire faites aux femmes non accompagnées d’un tuteur masculin. Durant l’été 1980 et jusqu’en février 1981 où la pratique est systématisée, de nombreuses femmes sont interdites de sortie du territoire national parce qu’elles ne sont pas accompagnées d’un tuteur mâle. Des femmes vont s’organiser, hors de tout cadre syndical ou d’organisation de masse pour demander la levée de cette mesure. Des milliers de signatures sont rassemblées et portées au Président de la République. Le 8 mars, au cours d’une rencontre à l’Université d’Alger où des centaines de femmes sont réunies pour célébrer la Journée internationale des femmes, les autorités annoncent que la mesure est levée. Si les femmes avaient laissé faire à ce moment, les Algériennes seraient aujourd’hui obligées de voyager accompagnées par leur mari, père, et pourquoi pas leur fils !

Le projet de code de la famille

En février 1979 un avant-projet de code de la famille est élaboré au ministère de la justice. Malgré de multiples demandes des femmes exprimées dans différentes structures (syndicales, UNFA...) le projet n’est pas rendu public. Il est soumis en septembre 1981 à l’Assemblée populaire nationale -APN-.

Trois grandes manifestations d’octobre 1981 à décembre 1981, à un moment où seules les organisations du pouvoir ont droit à l’activité et à la parole publiques, vont se tenir devant l’Assemblée pour y déposer une pétition ayant rassemblé des milliers de signatures. Le texte dénonce le secret qui entoure l’adoption de ce projet de loi et demande son retrait. Les moudjahidate qui ont rejoint le mouvement demandent en janvier 1982 au Président Bendjedid de retirer le projet de code de la famille et énoncent les six points qui devraient fonder tout texte régissant les relations familiales (monogamie, droit inconditionnel au travail, partage égal du patrimoine, égalité de l’âge de la majorité matrimoniale, égalité en matière de divorce, protection efficace de l’enfance abandonnée). Le projet de code est retiré.

Mais en 1984, à la faveur d’une vaste opération de répression menée dans tous les milieux politiques, et qui laisse l’Algérie sans voix, le code de la famille est adopté en juin par l’APN composée uniquement de députés FLN.

En mai 1985 est créée la première association indépendante : l’Association Pour l’Egalité devant la Loi entre les Hommes et les Femmes -APELHF-. Elle ne sera légalisée qu’en 1989.

La période de l’affirmation publique du mouvement indépendant 1988 - 1991

Les manifestations d’octobre 1988 vont permettre une libéralisation de la vie politique. La Constitution va entériner ce qui s’est affirmé depuis des années, c’est à dire la volonté des citoyens d’exercer leurs droits civiques dans la liberté. A la faveur de ce mouvement de nombreuses associations de femmes se créent. Outre l’association pour l’égalité entre les hommes et les femmes -AELFH-, citons l’association pour l’émancipation de la femme -AEF-, l’association pour la défense et la promotion des droits de la femme -ADPF-, l’association indépendante pour le triomphe des droits des femmes -AITDF- Ces associations ont en commun les revendications suivantes : l’abrogation du code de la famille, la promulgation de lois égalitaires.

Défense de la mixité dans les établissements scolaires et du sport féminin : Les associations de femmes, dans une déclaration commune du 20 juin 1989 dénoncent "les tentatives de l’APN de supprimer le sport féminin ...et la transformation de l’école en un lieu de matraquage idéologique". Une manifestation est organisée le 2 juillet à Alger devant le siège de l’APN.

Dénonciation des violences faites aux femmes et que le gouvernement Hamrouche laisse faire : en juin 1989 la maison d’une femme divorcée est brûlée à Ouargla et son fils de trois ans périt dans l’incendie ; des étudiantes sont agressées à Blida par des islamistes qui veulent les empêcher de sortir le soir, à Bou Saada, les maisons de cinq femmes qui vivent seules sont incendiées. Les associations de femmes organisent des rassemblements le même jour, le 23 novembre 1989, à Alger, Oran et Annaba, pour protester contre "l’escalade de la violence, et de l’intolérance à l’égard des femmes".

Méthodes d’action : rassemblement, manifestations sur la voie publique et délégations auprès des autorités sont le fait de plusieurs associations réunies pour la circonstance. Ces actions menées en commun et notamment la célébration de la Journée internationale des femmes du 8 mars 1989, vont pousser les associations à mener plus loin leurs liens et une Coordination nationale réunissant plus de 14 associations et divers groupes embryonnaires venus des quatre coins d’Algérie (Alger, Oran, Constantine, Oran, Tizi Ouzou, Mostaganem...) traite pendant deux jours, les 30 novembre et 1er décembre 1989, des problèmes auxquels sont confrontées les Algériennes et élabore en commun une plate-forme. Elle se réunit régulièrement jusqu’à la fin de 1991.

La reconquête du droit de vote

Le droit inconditionnel de vote est l’un des points abordés par la Coordination. La nouvelle loi électorale élaborée en 1989 permet à un homme, non seulement de détenir jusqu’à cinq procurations mais aussi de voter à la place de sa femme sur simple présentation du livret de famille. Pendant deux ans, l’action déterminée et unitaire des associations de femmes va aboutir à ce que le vote à la place du conjoint soit déclaré inconstitutionnel et que le nombre de procurations soit limité à une par personne et l’utilisation de la procuration strictement réglementée.

Le résultat du premier tour des élections législatives du 25 décembre 1991, qui a vu le FIS remporté plus de 47 % des sièges de la future Assemblée, est le point de départ d’une divergence dans le mouvement des femmes entre celles qui soutiennent inconditionnellement le pouvoir dans son opération d’arrêt des élections par peur du mouvement islamiste et celles qui expriment leur crainte de se faire utiliser, de servir de masse de manoeuvre.

Il est vrai que la violence qui se développe de plus en plus jusqu’à atteindre le niveau actuel a eu pour conséquence de ralentir l’avancée du mouvement des femmes d’une part parce qu’il perd son unité et d’autre part parce que les conditions de l’action politique sont rédhibitoires. Mais le mouvement des femmes tend aujourd’hui à se ressaisir et à se recomposer autour de ses propres préoccupations.

(c) Site Web de l’Apel - Juillet 2002

Source : famalgeriennes.free.fr

Mis en ligne sur Sisyphe, le 6 mars 2005



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