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mardi 9 mai 2006
Lettre ouverte à la suite de l’émission « Vous mariez pas, les filles ! » (Radio-Canada)

par Martin Dufresne

Émission Un autre regard - Des idées plein la tête
Le 8 mai 2006
Société Radio-Canada

J’ai écouté avec intérêt votre émission radio du 8 mai, « Vous mariez pas, les filles », animée par Joane Prince. Veuillez agréer quelques commentaires.

J’aurais surtout aimé voir plus de place faite au nombre croissant de gens qui choisissent de ne pas se marier ou de ne pas le rester, par exemple, en donnant la proportion de gens qui habitent seuls, même s’ils et elles ont une vie sentimentale ; en validant plus ouvertement le fait de ne pas vivre avec les gens qu’on aime ou de se quitter quand on ne s’aime plus ; et surtout en disant plus clairement que c’est avant tout pour élever des enfants que les gens se marient, et que ceux qui n’en veulent pas ou qui constatent que, lorsqu’on n’en veut qu’un ou deux, la vie peut être meilleure séparément, en fin de compte, surtout face à un conjoint violent, intoxiqué ou courailleur, bref que beaucoup décident de ne pas se marier ou ne pas le rester, même si ça fait ch... les vendeurs de ’toasters’ et de bungalows.

Bref, quelques statistiques pertinentes et témoignages enthousiastes auraient fait plus de bien que les intonations culpabilisantes ou romantisantes qui ont dominé les propos de Prince et de Marie Plourde. Il y a heureusement eu des moments de réalisme et de courage - bravo Geneviève St-Germain ! - qui ont porté la conscience un peu plus haut sans aller, hélas ! jusqu’au véritable débat de fond.

Par ailleurs, j’ai trouvé tout à fait pathétique la place faite par Carmel Dumas, dans son documentaire d’ouverture, au « bitchage » - il n’y a pas d’autre mot, vraiment - contre les premières conjointes et contre les responsabilités alimentaires des hommes par l’aile féminine du lobby anti-pensions. Cela détonait totalement avec le reste de son délicieux documentaire et je n’ai pas dû être le seul à me demander s’il n’y avait pas là un investissement personnel de l’auteure.

Le plus étrange, c’est que j’ai toujours admiré le style innovateur et le courage politique de Madame Dumas face aux vaches sacrées du show biz. Mais quand elle s’en prend aux droits économiques des femmes, là, je tombe en bas de ma chaise d’entendre cette attaque à boulets rouges contre celles qui ont l’impudeur de réclamer l’application de la loi et de leur contrat de mariage quand Monsieur cesse d’y trouver son compte. Une femme de plus à présenter les femmes comme les pires ennemies du féminisme. et à se donner raison, selon le truc classique de la « self-fulfilling prophecy ».

« Cul d’or » ou travail domestique ?

Pourquoi nous imposer cette fausse dichotomie, ce conflit entre femmes mis en scène par l’homme qui passe de l’une à l’autre et joue l’une contre l’autre pour occulter sa propre responsabilité ? Des hommes qui ont habituellement utilisé les premières comme mères à la maison, détournées d’un travail salarié pendant 15 ou 20 ans, et qui, bien enrichis et « paternisés » grâce au soutien logistique de ces femmes durant toutes ces années, se disent en droit de se laver les mains de toute responsabilité d’un contrat qu’ils ont tout de même signé et exploité sans vergogne.

Je trouve ça particulièrement dommage quand on a lu Dumas* et qu’on a partagé son indignation à s’être vue exploitée par des producteurs en tant qu’autrice-scénariste-réalisatrice payée à rabais. Pourquoi monter au front contre les droits d’une autre femme quand c’est un mec qui utilise l’une et l’autre ? Parce que les seuls hommes encore disponibles se plaignent d’avoir un fil à la patte ?

Carmel Dumas aurait au moins pu faire entendre des représentantes des femmes - et des enfants - qui subissent la guérilla des mauvais payeurs et l’incurie de l’État et des tribunaux pour les rendre imputables, plutôt que de donner autant de place et de "crédibilité" aux femmes-alibi rameutées par les masculinistes de "Fathers for Justice", dans ce qui m’a semblé un trop long segment, absolument pas raccordé au reste de son documentaire.

J’espère mieux la prochaine fois.

Martin Dufresne

*Le retour à l’école d’une waitress de télévision, Carmel Dumas, Lanctôt Éditeur, 2003.

 Voir le lien de cette émission.

Mis en ligne sur Sisyphe, le 9 mai 2006.



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